Abstract

Chapitre 1: -La lettre: - Vers le milieu du mois de mai 1660, à neuf heures du matin, lorsque le soleil déjà chaud séchait la rosée sur les ravenelles du château de Blois, une petite cavalcade, composée de trois hommes et de deux pages, rentra par le pont de la ville sans produire d'autre effet sur les promeneurs du quai qu'un premier mouvement de la main à la tête pour saluer, et un second mouvement de la langue pour exprimer cette idée dans le plus pur français qui se parle en France: - Voici Monsieur qui revient de la chasse. Et ce fut tout. Cependant, tandis que les chevaux gravissaient la pente raide qui de la rivière conduit au château, plusieurs courtauds de boutique s'approchèrent du dernier cheval, qui portait, pendus à l'arçon de la selle, divers oiseaux attachés par le bec. A cette vue les curieux manifestèrent avec une franchise toute rustique leur dédain pour une aussi maigre capture, et, après une dissertation qu'ils firent entre eux sur le désavantage de la chasse au vol, ils revinrent à leurs occupations. Seulement un des curieux, gros garçon joufflu et de joyeuse humeur, ayant demandé pourquoi Monsieur, qui pouvait tant s'amuser, grâce à ses gros revenus, se contentait d'un si piteux divertissement: - Ne sais-tu pas, lui fut-il répondu, que le principal divertissement de Monsieur est de s'ennuyer ? Le joyeux garçon haussa les épaules avec un geste qui signifiait clair comme le jour: "En ce cas, j'aime mieux être Gros Jean que d'être prince. " Et chacun reprit ses travaux. Cependant Monsieur continuait sa route si mélancolique et si majestueux à la fois qu'il eût certainement fait l'admiration des spectateurs s'il eût eu des spectateurs; mais les bourgeois de Blois ne pardonnaient pas à Monsieur d'avoir choisi cette ville si gaie pour s'y ennuyer à son aise; et toutes les fois qu'ils apercevaient l'auguste ennuyé, ils s'esquivaient en bâillant ou rentraient la tête dans l'intérieur de leurs chambres, pour se soustraire à l'influence soporifique de c…

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